Des médiations didactiques pour que le « migrant » transforme son « déplacement »
en « mobilité » Il incombe donc désormais aux intervenants dans les domaines du FLE et du FLS d’accompagner l’individu de façon à ce qu’il transforme son « déplacement » en « mobilité » pour reprendre une distinction que Kaufmann et Jemelin (2004) nous invitent à effectuer. Pour ces sociologues, un déplacement dans l’espace devient mobilité lorsqu’il implique aussi un changement social. La migration illustre ce phénomène puisque le migrant doit être en mesure de s’adapter au nouvel espace produit par son déplacement :
|
« le jonglage inventif entre les modes de déplacement (voiture, transport public, marche à pied dans les zones centrales...) et entre les formes de déplacement (physiques, virtuels) est utilisé comme une ressource pour repousser les incompatibilités spatio-temporelles auxquelles sont confrontés les acteurs» (p. 7).
|
Considérant la mobilité comme possibilité globale de l'acteur social de gérer des modes - et des formes - de déplacement physique et cognitif en vue d'organiser les conditions de son changement social, et de son empowerment on peut souligner qu'elle est inégalement répartie, dans un système économique mondial dont la gestion se déterritorialise avec les bouleversements (et les replis identitaires) que cela génère tant sur le plan collectif que sur le plan des destinées individuelles…
Réalités bien perçues par les didacticiens, intervenants et chercheurs qui travaillent au
contact des migrants et se trouvent, de fait, acteurs d'une évolution paradigmatique : prendre en compte (les inégalités dans) la mobilité dans l’enseignement/apprentissage du FLE/FLS et développer des médiations (relationnelles, cognitives, sémiotiques) visant à engager le sujet dans une parole et dans un discours reliant des langues, des cultures, des références, des représentations, des émotions, des espaces et des temporalités.
La problématique de ce numéro sera ainsi la suivante :
Face aux migrations plurielles des publics, face aussi à la diversité des « contextes » dans lesquels s’effectuent ces mobilités pour chaque individu et, par conséquent, face à la diversité des histoires individuelles et collectives que ces mobilités véhiculent, quels cadres théoriques ? quelles valeurs ? quelle discussion éthique ? quelles ressources pratiques ? sont créées, discutées, partagées en DDL ? Comment relier, penser et mettre en oeuvre (en particulier en contexte francophone) les compétences de médiation et d’accompagnement, les actions de suivi, la conception d’outils, etc. ? Confrontés à des situations de plurimigration et de plurilinguisme, des mises en liens entre arts et langages s’avèrent, notamment nécessaire à tous ceux qui, mettant en oeuvre une « altérité en actes » (voir par exemple le travail de Mireille Ciffali-Bega), accompagnent des sujets en mobilité. Ce numéro spécial devrait permettre de penser globalement une didactique prenant encore mieux en compte « l’homme pluriel » (Lahire, 1998) en hyper-mobilité et ses ressources pour apprendre tout en conciliant i) son aspiration individuelle à créer son propre parcours et ii) les opportunités (sociales et professionnelles) qu'offrent les sociétés de transition/d’accueil.
Recherches et Applications / Le Français dans le Monde a pour finalité de diffuser en français l’actualité des travaux de recherche relatifs à l’enseignement et l’apprentissage du français langue étrangère ou seconde dans le monde. Elle se situe dans le champ de la didactique des langues défini comme un espace pluridisciplinaire et est une revue de référence qui s’adresse aux enseignants,
chercheurs et jeunes chercheurs, décideurs, impliqués dans ce domaine. Chaque numéro est construit autour d’une thématique.
Les articles de la revue sont soumis aux règles d’une double évaluation anonyme, prise en charge par les membres du comité de lecture de la revue. Les contributions (de 20.000 et 25.000 signes) sont à envoyer pour le 15 juillet 2018 aux deux coordinatrices du numéro : Muriel Molinié
molinie.muriel@wanadoo.fr et Danièle Moore dmoore@sfu.ca