Congrès de Chennai : entretien avec Amrita Raghunandan

Amrita Raghunandan a un parcours riche et varié.
Enseignante, traductrice, organisatrice d'événements, elle a aussi présenté des communications lors de congrès régionaux et internationaux de la FIPF.  
Elle est aujourd'hui présidente de la zone sud de l’IATF (Indian Association of Teachers of French) , vice présidente du comité national de l’IATF et vient d'être élue vice présidente de la CAP (Commission pour l'Asie-Pacifique).


C'est d'ailleurs l'IATF qui est chargée de la réalisation du 3e Congrès régional de la Commission pour l’Asie-Pacifique (CAP) du 13 au 16 février 2013, à Chennai en Inde sur le thème: Le français en Asie-Pacifique: la passion et la raison.

Comment expliquer ce thème ? Quels sont les atouts de la ville de Chennai pour ce congrès ? Comment se porte la francophonie dans cette région du monde ?
À quelques mois du congrès, Amrita Raghunandan répond à nos questions.

 

 

1) Pouvez-vous expliquer en quelques mots le thème choisi pour ce congrès : Le français en Asie Pacifique – la passion et la raison ?


L’Inde et plusieurs autres pays de l’Asie-Pacifique sont des pays anglophones ; et être francophone dans cette région est le résultat d’un choix qui est provoqué par la passion ou bien par la raison.  
Je m’explique : d’un côté, il y a le jeune étudiant qui est fasciné par l’intonation ou la prononciation de la langue française si différentes de l’anglais et qui voudrait donc la maîtriser. Il y a aussi celui qui est passionné par la littérature, le cinéma, la mode et la haute couture ou la gastronomie. Pour lui, la langue française serait le moyen d’approfondir ses connaissances sur sa passion. De l’autre côté, il y a celui qui choisit le français pour les opportunités. Avec la mondialisation, plusieurs entreprises françaises se sont installées dans nos pays. Apprendre le français devient une nécessité pour un meilleur travail, un meilleur salaire ou plus de responsabilités.    

 


2) Selon vous, qu'est-ce qui fait de Chennaï la ville idéale pour accueillir ce 3e congrès Asie Pacifique ?


Notre choix de Chennai, curieusement, a été inspiré par cette dichotomie. Chennai est une ville qui veut sauvegarder son riche héritage culturel, promouvoir les arts et l’artisanat et ne pas oublier ses traditions sociales. Mais c’est aussi une ville dynamique et moderne avec un peuple cosmopolite. À Chennai, le français est enseigné dans environ 200 établissements. L’Alliance Française de Madras a toujours été un grand soutien pour notre Association. Et il y a environ 80 sociétés françaises (Michelin, Renault, Areva, Technip, Reynolds…) dans et autour de Chennai. D’ailleurs, son aéroport moderne est accessible depuis tous les pays de l’Asie-Pacifique.  

 

3) En 2012, quelle est la place de la francophonie en Inde ? En Asie Pacifique ? Quelles en sont les perspectives (éducatives, politiques...) ?


En Inde, en principe, dans le cadre de la scolarisation du curriculum national, chaque état doit adopter la formule de trois langues selon laquelle les langues étrangères (sauf l’anglais) n’ont pas de place. Toutefois, tous les programmes du système éducatif indien offrent la possibilité d’étudier une langue étrangère au niveau secondaire et dans les programmes du premier cycle universitaire, dans les collèges. Le français est le plus répandu, parmi les langues étrangères. Mais pour être en conformité avec la politique de l’Etat dans sa promotion de la langue régionale, les écoles découragent de plus en plus l’étude d’une langue étrangère. Certains « collèges » ferment le département de français quand le professeur prend sa retraite. En revanche, le département de français est plutôt actif au niveau universitaire. Pourtant, l’attrait pour les études françaises et francophones dans une quinzaine d’universités indiennes reste centré sur la littérature. Au Tamil Nadu, les universités de Chennai, Pondichéry, Madurai et Coimbatore offrent des cours de certificat et de diplôme ainsi que le M.A. French.
Le lycée français de Pondichéry est en pleine expansion avec l’ouverture d’une section bilingue anglais-français. Son antenne à Karaikal qui était jusque là menacée de fermeture, prend maintenant une nouvelle allure. Le lycée français assure la scolarisation des enfants des Français qui sont restés à Pondichéry et attire aussi des Indiens qui voudraient poursuivre leurs études supérieures en France.
Les effectifs dans les Alliances Françaises ne cessent d'augmenter. Il y en a environ 4000 à l’Alliance Française de Madras avec ses trois antennes de Coimbatore, de Trichy et de Madurai.  Avec celle de Pondichéry, cela fait 5 centres dans le sud qui offrent une formation de qualité très recherchée sur le marché du travail.
Malgré les possibilités pour étudier le français, ce qui manque c’est le français de spécialisation. Il faut un français pour la mode, pour l’hôtellerie, la restauration et le tourisme, un français scientifique et technique ainsi qu’une formation rigoureuse dans le domaine de la traduction et de l’interprétation. Il faut également un programme de français fait sur mesure selon les besoins des différents secteurs du marché du travail.
En ce qui concerne les autres pays de l’Asie Pacifique, je crois que c’est à peu près la même chose.  

 

4) Qu'attendez-vous de ce congrès ?


Organiser ce congrès, est un grand honneur pour l’IATF. C’est la première fois que nous organisons un événement à cette échelle. Pour moi, ce congrès représente des rencontres et des échanges. La plupart de nos professeurs ont rarement la possibilité d’aller aux forums internationaux. Ici, les professeurs indiens auront  non seulement une plateforme  pour s’exprimer mais aussi l’opportunité de rencontrer des personnes de ressources de haute qualité de tant de pays francophones. Ce congrès va, sans aucun doute, encourager  chacun d’eux dans son chemin de promotion de la francophonie en Inde. Pour nous les organisateurs, ce congrès nous servira de vitrine non seulement pour montrer le calibre de nos jeunes professeurs de français mais aussi pour donner un aperçu de la belle culture qui est la nôtre. J’espère que ce congrès créera des liens et des amitiés entre les professeurs des pays de l’Asie Pacifique et aussi du monde entier pour le plus grand bien de la francophonie.   

 

Merci Amrita d'avoir répondu à nos questions.